Chronologie Histoire

C'est dans les deltas qui, propices à la culture du riz inondé, permettaient de nourrir des populations nombreuses, que se sont développées les grandes civilisations :
- au Sud, dans le delta du Mékong, la civilisation venue de l'Inde : partant des bouches du Mékong, elle a gagné par mer la côte d'Annam où s'est implanté le royaume cham et, en remontant le cours du Mékong, le bas Laos et la région des Lacs où elle a donné naissance à l'empire d'Angkor ;
- au Nord, dans le delta du Fleuve Rouge, la civilisation venue de la Chine : c'est sur son socle que s'est construite la nation vietnamienne ; limitée à l'origine au bassin du Fleuve Rouge, elle s'est étendue peu à peu à toute la côte, grâce à la poussée du Vietnam vers le Sud, éliminant au passage la civilisation cham et refoulant les Khmers vers le Tonlé Sap

Le Fou-Nan, le Tchen-La et l'empire khmer d'Angkor
Le premier Etat indianisé de quelque importance est celui du Fou-Nan qui apparaît sur les rives occidentales du golfe de Siam à partir du ler siècle après J-C. Selon la légende, il aurait été fondé par un brahmane indien qui aurait épousé une princesse locale, fille du "roi des Naga" (c'est-à-dire des Dragons génies des eaux) qui donna au couple le pays "après avoir bu les eaux qui le recouvraient". Le royaume construit un réseau de canaux de drainage entre le Bassac et le golfe de Siam. Il commerce avec l'Inde et la Chine mais s'effondre au Vlème siècle sous la poussée de son voisin et ancien vassal le Tchen-La
Le Tchen-La donnera naissance à l'empire khmer. Le royaume serait né de l'union d'un ermite du nom de Kambu, ancêtre de tous les Cambodgiens, avec une nymphe céleste du nom de Méra qu'il aurait reçue en mariage du dieu Çiva. De cette union descendraient tous les rois khmers. Après avoir vaincu le Fou-Nan, les rois du Tchen-La font l'unité du moyen et du bas Mékong. Puis, au Vlllème siècle, leur royaume se divise en deux : le Tchen-La de terre et le Tchen-La d'eau.
Au IXème siècle, les rois khmers s'installent dans la région d'Angkor, près des grands lacs, et jettent les fondements d'un empire qui dominera le sud de la péninsule jusqu'au Xlllème siècle. Ils instaurent le culte du dieu-roi et fondent un Etat centralisé. Angkor, au centre de l'empire unifié, est au coeur d'un immense système hydraulique de digues, de réservoirs, de canaux, recueillant les eaux vives et les eaux de pluie et les redistribuant dans les rizières. Les Khmers ont pu ainsi compenser les accidents climatiques, multiplier les récoltes, assurer la prospérité qui permettra l'essor de l'empire. Le célèbre temple d'Angkor Vat date de la première moitié du Xllème siècle, Angkor Thom et le Bayon de la fin du Xllème et du début du Xlllème siècle. Mais déjà certains signes annoncent le déclin. Angkor subit les attaques de ses voisins Chams, ainsi que des Siamois qui s'affirment comme puissance rivale et à plusieurs reprises envahissent le Cambodge et ravagent sa capitale (en 1313, 1351, 1420 et 1473). Au XVème siècle, Angkor est abandonnée, la capitale est transférée à Phnom Penh, Au XVlllème siècle, les Vietnamiens s'installent en Cochinchine. Le royaume khmer, affaibli et déchiré par des querelles internes, ne survit plus que sous la double tutelle des Thaïs et des Vietnamiens.

Le Champa
Sous le nom de Lam-Ap, un royaume de langue indonésienne apparaît à la fin du Ilème siècle après J-C, dans la région de Hué. Très vite, le royaume s'indianise et prend le nom de Champa. Les Chams, peuple marin, sont des pirates qui tirent une bonne part de leurs ressources d'attaques sur la route du commerce maritime en mer de Chine ; ils passent leur temps à guerroyer contre leurs voisins : Khmers dont ils prennent la capitale en 1177 mais qui prennent leur revanche au début du Xlllème siècle, et surtout Vietnamiens. Mais le Champa, dont la civilisation brillante a laissé de magnifiques monuments d'architecture sera incapable de résister à la pression vietnamienne.

Le Vietnam
Quant au Vietnam, son histoire est celle d'un peuple qui a continuellement lutté pour sa survie, contre les eaux du Fleuve Rouge capable de crues dévastatrices, contre la Chine pour faire reconnaître son indépendance, contre ses turbulents voisins chams, khmers ou thais qu'il a fini par écraser. Au VIIème siècle av. J-C, il existait dans le bassin du Fleuve Rouge un royaume nommé Au Lac. En 207 av. J-C, des Chinois fondent au sud de la Chine un royaume de Nan Yue ou Nam Viet englobant celui d'Au Lac. En 111 av. J-C, la dynastie des Han annexe l'ensemble jusqu'au col des Nuages. La domination chinoise durera 1.000 ans. Le pays est placé sous l'autorité de gouverneurs chinois qui lui imposent une discipline de fer. Le Vietnam devient une "province de la civilisation chinoise". Les Chinois introduisent l'usage de la charrue, mettent de nouvelles terres en culture, créent des écoles, imposent aux Vietnamiens coutumes et rites chinois. C'est aussi par la Chine que le bouddhisme mahayana (ou du Grand Véhicule) arrive au Vietnam.
Contre cette domination des révoltes éclatent périodiquement, comme celle des soeurs Trung (de 39 à 43). En 938, Ngo Quyên réussit enfin à libérer son pays et crée un royaume indépendant qui prend le nom de Dai-co-viet. En 1164, les Chinois lui donneront le nom de An-nain, ou "Sud pacifié". Dans les siècles qui suivent, sauf pendant une courte période d'occupation par les forces de l'empire Ming entre 1407 et 1428, le pays consolide son indépendance en repoussant plusieurs tentatives d'invasion chinoises, sous les Song en 1076, et à trois reprises, en 1257, 1280 et 1287 par les armées mongoles
Avec le Champa, son belliqueux voisin du Sud, les hostilités sont constantes. Les Chams, dont la population est peu dense, sont incapables de résister à l'avance des paysans vietnamiens. Ceux-ci occupent peu à peu les plaines vierges du Nord-Champa. Dès le XIIème siècle, toutes les plaines côtières au nord de Hué sont devenues vietnamiennes. L'étape suivante est en 1306 l'annexion de Hué et des provinces voisines par le mariage d'une soeur du roi du Champa avec le roi du Vietnam. En 1471, après une reprise des hostilités, le Vietnam inflige aux Chams une défaite sévère entraînant la destruction de leur capitale Vijaya (Binh Dinh) et étend ses frontières jusqu'au cap Varella. Il ne reste plus du royaume du Champa, jadis florissant, que des lambeaux de territoire ; au cours du XVIème siècle, il disparaît peu à peu de l'histoire.
Sur le plan intérieur, le Vietnam s'organise sur le modèle chinois, tout en affirmant son identité vietnamienne. De la Chine viennent le bouddhisme, le taoïsme, le confucianisme qu'adoptent les Vietnamiens tout en continuant de pratiquer le culte des génies et des héros, avec le culte des ancêtres, Les Vietnamiens conservent leur langue, mais leur enseignement est fondé sur l'étude des caractères et des grands textes chinois.
La géographie du Vietnam ne facilite cependant pas les communications du nord au sud du pays, que divisent les rivalités entre grandes familles. Sous la dynastie des Lê postérieurs (1595-1796), le royaume se divise. La ligne de partage se situe au 17ème parallèle. Au Nord, tout le pouvoir est confisqué par les Trinh. Au Sud, les Nguyên installent leur capitale à Hué, dans la province de Thuanhoa récemment conquise sur les Chams, et reprennent à leur compte leur "marche vers le Sud". A la fin du XVllème siècle, ils atteignent le delta du Mékong d'où ils refoulent peu à peu les Khmers qui se replient sur le bassin du Tonlé-Sap. En 1757, ils ont pris possession de toute la Cochinchine y compris la pointe de Camau.
Dans l'Indochine de 1860, la puissance dominante était celle du Vietnam. C'était le pays le plus peuplé et le plus riche. Depuis 1802, il avait refait son unité sous la dynastie des Nguyén. Il avait terminé sa "marche vers le Sud" et cherchait désormais à renforcer son contrôle sur les hauts plateaux de l'intérieur, ainsi que sur le Cambodge et le Laos. Mais dans ces deux pays, son influence se heurtait à celle du Siam.
Pour le Cambodge, sans cesse envahi et pillé par ses voisins siamois, au point que le site d'Angkor avait été abandonné et la capitale transférée à Oudong, les splendeurs de l'empire khmer n'étaient plus qu'un souvenir. Le Vietnam avait tenté de l'annexer en plaçant à sa tête un résident-général vietnamien et en lui imposant une vietnamisation forcée. Les Khmers, encouragés par le Siam, s'étaient révoltés. Mais après une courte guerre, le Siam et le Vietnam s'étaient mis d'accord pour placer le Cambodge sous leur double suzeraineté.
De même le Laos, divisé en plusieurs principautés, dévasté par les guerres et la piraterie, était tenu étroitement en bride par les Siamois, tout en versant tribut aux Vietnamiens qui s'étaient par ailleurs assuré le contrôle du plateau du Tran Ninh (ou "plaine des Jarres").
L'intervention française allait assurer la survie de ces deux pays en leur évitant le dépeçage et mettre fin pour un temps au mouvement d'expansion du Vietnam.


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